Le 10 décembre 2021 Par Mathias Lavole (IRMa)
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Bonjour,
Vaste question que l'obligation éventuelle d'évacuer.
Dans le cadre de ses pouvoirs de police, le maire dispose de certains outils pour prévenir les actes de petite délinquance, les incivilités et les comportements irritants qui, s’ils ne méritent pas d’être traduits en justice, doivent cependant être réprimandés, dans le but d’éviter la récidive. C’est l’objet du « rappel à l’ordre », introduit en droit positif par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, codifiée aux articles L. 132-1 et L. 132-4 du code de la sécurité intérieure (CSI).
Code de la sécurité intérieure, Article L132-7, Création Ordonnance n°2012-351 du 12 mars 2012 - Annexe, v. init. :
"Lorsque des faits sont susceptibles de porter atteinte au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité ou à la salubrité publiques, le maire ou son représentant désigné dans les conditions prévues à l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales peut procéder verbalement à l'endroit de leur auteur au rappel des dispositions qui s'imposent à celui-ci pour se conformer à l'ordre et à la tranquillité publics, le cas échéant en le convoquant en mairie. Le rappel à l'ordre d'un mineur intervient, sauf impossibilité, en présence de ses parents, de ses représentants légaux ou, à défaut, d'une personne exerçant une responsabilité éducative à l'égard de ce mineur."
Domaines d’application du rappel à l’ordre
Le rappel à l’ordre peut s’appliquer :
- Au non-respect des arrêtés de police du maire lorsqu’ils portent sur des questions de bon ordre, de sûreté et de salubrité publiques ;
- A d’autres faits relevant d’une peine contraventionnelle (essentiellement pour les contraventions pouvant être constatées par la police municipale) ;
- A des comportements n’emportant pas de qualification pénale.
A titre indicatif, peuvent être concernés : l’absentéisme scolaire, la présence constatée de mineurs non accompagnés dans des lieux publics à des heures tardives, les incivilités commises par des mineurs, les incidents aux abords des établissements scolaires, les conflits de voisinage, les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes, certaines atteintes légères à la propriété publique, l’abandon d’ordures, de déchets, matériaux ou autres objets, la divagation d’animaux, etc. En matière de compétence territoriale, le rappel à l’ordre s’applique à un résident de la commune.
En conclusion :
Le maire peut donc imposer, sur la base d'un arrêté municipal l'évacuation d'un quartier particulier pour un phénomène donné. Il faut cependant que cette évacuation soit motivée et que l'arrêté permette de comprendre la décision prise.
Sauf que, dans certains cas et malgré l'obligation, des habitants refuseront d'évacuer le bien.
Il s'agira donc, pour le maire de se poser la question de repasser avec des forces de l'ordre et d'engager une évacuation forcée du bâtiment ? Cela implique d'avoir un accord du procureur de la République et de retourner ensuite sur les lieux avec des forces de l'ordre. Dans des délais contraints cela peut sembler difficile à réaliser sans s'exposer ou exposer les forces de l'ordre à un risque.
Pour cela, de nombreuses communes font signer une décharge aux habitants refusant d'évacuer. le principe étant de perdre le moins de temps possible. En effet, négocier pendant 10 minutes avec une personne refusant d'évacuer son logement retarde en cascade de 10 minutes l'alerte "évacuation" de la personne suivante.
La démarche serait donc la suivante :
- Arrêté du maire portant obligation d'évacuation d'un quartier ;
- Information des habitants du quartier de l'évacuation avec effet immédiat ou non ;
- Contrôle de l'évacuation et en cas de refus signature d'une décharge (type sapeurs-pompiers) mentionnant le refus d'évacuer sous XXX conditions ;
- Contacts entre le maire et le Procureur pour l'informer des difficultés rencontrées ;
- Si possible et nécessaire, nouveau passage du maire + forces de l'ordre pour procéder à une évacuation forcée.
A savoir : le protocole entre le maire et le procureur de la République
Pour mieux définir la procédure de rappel à l’ordre, un protocole entre le maire et le procureur de la République peut être conclu, définissant le domaine d’application, le domaine d’exclusion, les relations avec l’autorité judiciaire, la conduite du rappel à l’ordre, le suivi et le bilan du dispositif. Ce dispositif impliquera, pour un bon fonctionnement, d’établir des liens et des échanges systématiques avec le Parquet préalablement à toute décision de recourir au rappel à l’ordre.
Cordialement |