VOS QUESTIONS !

1 La mise en eau du lac du Monteynard peut-elle être à l’origine des glissements qui affectent les versants situés en rive gauche, notamment ceux d’Avignonet et de Sinard ?
2 Les séismes ont-ils une influence sur l’évolution des glissements du Trièves-Beaumont ?
3 Y a-t-il une différence entre les notions de suivi et de surveillance de sites à risque ?
4 Quelle est la différence entre les suivis réalisés respectivement par le service de Restauration des Terrains en Montagne de l’Isère (RTM 38) et le Laboratoire de Géophysique Interne et Tectonophysique (LGIT) de Grenoble ?
5 L’événement meurtrier de la Salle-en-Beaumont aurait-il pu être anticipé si la combe des Parajons avait à l’époque fait l’objet d’un suivi similaire à ceux réalisés aujourd’hui ?
6 La présence de constructions anciennes n’étant affectées par aucun désordre signifie-t-elle qu’elles sont implantées sur des secteurs stables où le risque de glissement est absent ?
7 Pourquoi la quasi-totalité des communes du Trièves et du Beaumont ne sont-elles pas dotées de documents réglementaires d’affichage du risque plus récents que les R.111-3 ?
8 Comment la mise en place d’ouvrages d’art imposants (tunnel de Sinard, viaduc de Monestier etc.) dans le cadre de la construction de l’autoroute A51 a-t-elle été possible sur les terrains instables du Trièves ?


La mise en eau du lac du Monteynard peut-elle être à l’origine des glissements qui affectent les versants situés en rive gauche, notamment ceux d’Avignonet et de Sinard ?

En tant que lac de barrage, Monteynard-Avignonet voit ses eaux fluctuer de plusieurs mètres au cours de l’année, entraînant des variations de la nappe d’eau dans le versant. Leur cote maximale atteint 490 mètres d’altitude, ce qui correspond à peu près à la base du niveau de sédiments récents déposés au quaternaire, qui est constituée d’alluvions stables. Les argiles se trouvent au-dessus de cette couche, et ne peuvent donc pas être baignées par les eaux du lac, même quand il est au plus haut. Par ailleurs, les surfaces de cisaillement si situent plus de cent mètre au-dessus de ce niveau maximum. Enfin, il semble que les glissements affectant les versants qui surplombent le lac soient des réactivations de phénomènes anciens, qui se sont déclenchés il y a plusieurs centaines voire plusieurs milliers d’années. Dans ces conditions, rien ne permet d’affirmer que le lac ait une influence sur les instabilités actuelles.
Des habitants répondent à cela que les mouvements du sol se sont pourtant accentués à la suite de la mise en eau du lac, au début des années 1960. Certes, mais il faut préciser que plusieurs séismes ont été enregistrés depuis cette époque dans la région (trois dans les années 1960, dont deux importants aux mois d’avril 1962 et 1963, un dans les années 1970 et un autre dans les années 1990). Les récentes accélérations locales ne pourraient-elles pas être liées à ces secousses ?
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Les séismes ont-ils une influence sur l’évolution des glissements du Trièves-Beaumont ?

Nous savons que les secousses du sous-sol peuvent contribuer à modifier les dynamiques d’évolution d’un glissement, notamment par modification de la circulation des eaux souterraines en cisaillant les chenaux d’écoulement : cette relation a été prouvée dans des régions à forte sismicité, mais qu’en est-il dans les Alpes françaises ?
Le Trièves et le Beaumont ne sont évidemment pas soumis à des séismes aussi violents que ceux qui affectent les régions du monde où les plaques tectoniques sont les plus actives. Toutefois, plusieurs séismes dont la magnitude a pu atteindre 5.5 sur l’échelle ouverte de Richter (séisme de la Grande Moucherolle, 1962) ont été ressentis dans la région au cours des 50 dernières années. A cela s’ajoute le fait que les secousses sont amplifiées dans le Trièves-Beaumont, du fait de la composition physique des sols et de leur géométrie (ce phénomène est appelé effet de site).
Selon plusieurs études réalisées sur le sujet, il est plausible que ces secousses aient une influence sur les terrains argileux du Trièves-Beaumont, mais il n’est pour l’heure pas encore possible de dire dans quelle mesure. Des recherches sont actuellement en cours au Laboratoire de Géophysique Interne et Tectonophysique de Grenoble pour tenter d’approfondir la question.
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Y a-t-il une différence entre les notions de suivi et de surveillance de sites à risque ?

Le suivi et la surveillance se distinguent par leurs objectifs.
Le suivi désigne une procédure permettant de déterminer les caractéristiques d’un phénomène naturel (en l’occurrence un glissement) au cours d’une période donnée, de manière à acquérir des données relatives à son évolution dans l’espace et dans le temps, pouvant être utilisées à terme pour mettre au point ou corriger des modélisations.
La notion de surveillance renvoie en revanche à la gestion du risque : l’instrumentation d’un site a alors pour objet de donner l’alerte en cas de menace.
Un seul dispositif de surveillance et d’alerte existe en Isère, et il se situe au niveau des ruines de Séchilienne. Les sites à risque du Trièves et du Beaumont ne font l’objet que d’un suivi. A Monestier-du-Percy, même si la mise en place de fissuromètres peut s’apparenter à une mesure de surveillance, elle ne peut pas être considérée comme telle dans la mesure où les relevés sont fait manuellement par des habitants, c’est-à-dire par des personnes qui n’assurent pas une veille permanente et qui ne sont pas qualifiés pour assumer cette responsabilité aux yeux des autorités.
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Quelle est la différence entre les suivis réalisés respectivement par le service de Restauration des Terrains en Montagne de l’Isère (RTM 38) et le Laboratoire de Géophysique Interne et Tectonophysique (LGIT) de Grenoble ?

Les travaux du RTM ont pour objet de comprendre la dynamique globale d’évolution d’un certain nombre de glissements représentant une menace potentielle pour les hommes et/ou les constructions. Pour cela, des mesures sont réalisées sur un certain nombre de sites à plusieurs mois d’intervalle. La finalité est de comprendre comment évoluent les différents mouvements et à quelle vitesse, afin de déterminer si l’homme peut s’installer de manière pérenne sur ces lieux ou si à l’inverse il faut évacuer la population si le risque s’avère trop élevé.
Le suivi du LGIT est en revanche mené dans une optique de recherche scientifique, visant à comprendre comment un glissement, qui s’est développé dans tel type d’argiles, va réagir à telle ou telle sollicitation (précipitations, séismes). Pour y parvenir, le laboratoire a concentré ses observations sur un seul site, mais il est doté d’appareils de mesure très précis qui effectuent des relevés bien plus fréquents que ceux du RTM : certains paramètres sont même mesurés en continu. Comprendre précisément la réponse des terrains aux événements naturels pourrait peut-être un jour permettre de mettre en place des systèmes d’alerte à la population.
Même si les missions de suivi opérationnel réalisées par le RTM 38 sont différentes des missions de recherche effectuées par le LGIT, il existe des relations entre ces deux organismes qui échangent périodiquement leurs connaissances des sites, pour une meilleure réalisation de chacune de leurs missions.
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L’événement meurtrier de la Salle-en-Beaumont aurait-il pu être anticipé si la combe des Parajons avait à l’époque fait l’objet d’un suivi similaire à ceux réalisés aujourd’hui ?

Le glissement n’aurait dans tous les cas pas pu être anticipé. L’instrumentation mise en place sur douze sites à risques du Trièves-Beaumont a pour vocation d’assurer un suivi des glissements avérés et non leur surveillance. Ces dispositifs permettent de repérer des accélérations dans les mouvements des versants, mais sur plusieurs mois seulement, pas en temps réel.
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La présence de constructions anciennes n’étant affectées par aucun désordre signifie-t-elle qu’elles sont implantées sur des secteurs stables où le risque de glissement est absent ?

S’il est vrai que la présence de fissures sur un bâtiment révèle généralement des mouvements du sol, on ne peut dire que leur absence garantie la stabilité des terrains, même s’ils sont en place depuis longtemps. Un exemple particulièrement parlant est le cas de la maison qui a été détruite en 2007 à Monestier-du-Percy. Elle datait du XVIIe siècle, et s’est maintenue en bon état jusqu’à ce qu’elle ne soit affectée par un glissement voisin du fait de la régression de sa niche d’arrachement. L’habitation a eu beau ne pas bouger pendant plus de 200 ans, il ne s’est passé qu’une dizaine d’années entre l’apparition des premières fissures et l’interdiction d’habiter puis sa démolition liée au danger que représentait son état de détérioration très avancée.
Par ailleurs, la résistance d’un bâtiment aux mouvements du sol dépend largement de la conception de sa structure et des techniques employées pour sa construction. Deux constructions situées sur un même glissement peuvent donc réagir de manières différentes.
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Pourquoi la quasi-totalité des communes du Trièves et du Beaumont ne sont-elles pas dotées de documents réglementaires d’affichage du risque plus récents que les R.111-3 ?

Le fait que la plupart des communes du Trièves-Beaumont disposent de cartes R.111-3 signifie qu’elles se sont dotées très tôt (à partir des années 1960) de documents d’affichage du risque à valeur réglementaire. Ces cartes constituent des documents antérieurs aux Plans d’Exposition aux Risques (PER) et aux Plans de Prévention des Risques naturels prévisibles (PPR), qui sont apparus respectivement en 1982 puis en 1995 et qui ont permis de gagner en précision dans la délimitation des périmètres de risque et dans la définition des mesures de protection.
Le PPR est un outil relativement coûteux et complexe à mettre en œuvre et n’apparaît justifié que dans certaines conditions. En Isère, l’État a donné la priorité aux communes qui n’étaient dotées d’aucun document d’affichage du risque ainsi qu’aux secteurs soumis à une forte demande en terme d’urbanisation.
C’est pourquoi un certain nombre de territoires du Trièves et du Beaumont ont conservé leurs cartes R.111-3, qui suffisent dans le contexte de leur développement actuel. Pour les communes où ce document nécessitait d’être réactualisé, il a la plupart du temps été remplacé par une carte d’aléa plus précise. Seule Avignonet, qui présente un niveau de risque élevé, s’est vue attribuer un PER en 1990. Celui-ci est toujours en vigueur.
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Comment la mise en place d’ouvrages d’art imposants (tunnel de Sinard, viaduc de Monestier etc.) dans le cadre de la construction de l’autoroute A51 a-t-elle été possible sur les terrains instables du Trièves ?

Le choix du tracé de l’autoroute a évidemment nécessité la réalisation d’études géologiques et structurales préalables, afin de localiser les secteurs les plus propices à la mise en place des ouvrages d’art. Ils correspondent à des zones où les couches de sédiments présentent une épaisseur relativement faible. Car il a fallu d’une part aller chercher le substratum pour y ancrer les fondations des ouvrages réalisés et, d’autre part, protéger ceux-ci des mouvements toujours possibles dans les couches traversées.
Par ailleurs, la gestion des eaux de drainage et de collecte des eaux pluviales des plateformes a nécessité une attention toute particulière afin de limiter les risques de déstabilisation des terrains à l’aval
Cet exemple illustre bien le fait qu’en matière d’aménagement l’homme est désormais capable de s’affranchir d’importants obstacles imposés par le milieu naturel, si toutefois il est prêt à y mettre le prix, qui s’avère d’autant plus élevé que les contraintes sont délicates à contourner.
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