"au-delà de l'imaginable" la catastrophe de la valdaine du 6 juin 2002
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Aléas naturels et gestion des risques

Aléas naturels et gestion des risques

de Leone, Frédéric - Meschinet de Richemond, Nancy - Vinet, Freddy [ voir la fiche de l'ouvrage ]

« Un manuel écrit par 3 enseignants en géographie des risques naturels à l'Université Paul Valéry Montpellier III »
Auteur : Jean-Pierre Requillart

Date : 07/08/2011
Niveau(x) de lecture : Scolaire & Généraliste

Ce manuel est écrit par 3 enseignants en géographie des risques naturels à l’Université Paul Valéry Montpellier III ; si comme l’indique le nom de la collection (puf licence) il est d’abord destiné aux étudiants du premier cycle universitaire, il peut également intéresser un public beaucoup plus large dans la mesure où il dresse un tableau synthétique et relativement complet, à la fois dans le temps et dans l’espace, du thème de la catastrophe avant d’aborder plus succinctement celui des outils de gestion et de la gouvernance en matière de risques naturels.

A noter que divers compléments – notamment une bibliographie, des figures et des tableaux ne figurant pas dans le texte – sont disponibles sur le web :
Autres Collections:Aléas naturels et gestion des risques - Puf

Après une première partie consacrée à la présentation des concepts de base en matière de risque, de catastrophe et de leur évaluation, les deuxième (aléas d’origine géodynamique) et troisième (aléas d’origine hydroclimatique) parties abordent de façon analytique ces différents aléas, avec pour chacun d’entre eux une description détaillée du phénomène et de ses manifestations, sa répartition spatiale au niveau mondial et ses impacts historiques ; le texte est accompagné de nombreux tableaux, bilans et cartes particulièrement clairs et synthétiques.

Une quatrième partie traite avec la même qualité le domaine de la vulnérabilité et de son évolution, en montrant en particulier comment les disparités de développement ont pesé et pèsent encore lourd à l’échelle mondiale : contrastes géographiques (risques du Nord, risques du Sud ; degré d’urbanisation), poids de l’histoire amenant à diverses perceptions et représentations du risque.

Une dernière partie présente, de façon très globale, d’abord les principaux outils de la gestion des risques puis de leur gouvernance à travers les acteurs, leurs jeux et conflits sur un territoire déterminé, avant de conclure sur les limites des politiques basées sur la seule réglementation ou sur une trop grande prise en compte des besoins des administrés …

En conclusion, cet ouvrage, que je trouve facile à lire, devrait intéresser, au-delà de sa cible initiale, un public beaucoup plus large et notamment tous ceux qui souhaitent disposer rapidement d’une vision globale, synthétique et bien documentée, sur la problématique des risques naturels au niveau mondial.

La quatrième partie consacrée à la vulnérabilité et à son évolution présente, à mon avis, un intérêt particulier pour les décideurs et praticiens dans la mesure où elle traite d’une part d’un domaine relativement nouveau (par rapport à la connaissance de l’aléa) et où elle amène d’autre part à s’interroger sur les différentes stratégies menées, en particulier du fait de la fragilité de notre mode actuel de développement et de la croissance d’enjeux indirects.

Par contre, la dernière partie m’est apparu comme moins convaincante, compte tenu d’un traitement relativement superficiel [1] des nombreux sujets à aborder, même si une telle approche permet sans aucun doute d’appréhender la complexité de la gouvernance des risques naturels ; mais pouvait-il d’ailleurs en être autrement lorsqu’on traite un sujet aussi vaste, tant par la diversité des situations mondiales que par la spécificité des aléas et territoires concernés ? A la lueur des difficultés ou dysfonctionnements les plus fréquemment rencontrés lors des retours d’expérience, il aurait été légitime de s’interroger sur l’efficacité des diverses politiques menées et de se demander si souvent malgré les efforts faits et avec des nuances selon les aléas et les territoires, elles ne reviennent pas en fait à plus ou moins accompagner au mieux les grandes tendances de développement et à soulager les futures victimes …

Enfin, comme déjà indiqué, d’une façon générale la documentation de base et celle complémentaire disponible sur le web est particulièrement riche, à l’exception de celle concernant la webographie, plus indigente notamment en ce qui concerne les liens directs aux bases de données françaises sur les aléas … Cette lacune peut sans aucun doute être facilement comblée par les auteurs, compte tenu du mode de publication retenu.

 

[1] En outre, l’exemple de la politique RTM comme instrumentalisation consciente de l’Etat français (pp. 279-280) pour « asseoir entre autre son influence sur des territoires périphériques devenus français au milieu du XIXème siècle (Savoie, Comté de Nice) en instaurant la politique de restauration des terrains de montagne (lois de 1860, 1864 remplacées par celle de 1882) ... » ne me semble pas résister à une quelconque confrontation avec les données historiques, tout au moins celles que je connais ...

La loi sur le reboisement des montagnes de 1860 a certes suivi de 2 mois le rattachement de ces provinces à la France mais elle était en gestation depuis 1841 (donc sous Louis-Philippe !) comme réponse à la grave crise érosive rencontrée alors et, en sus de son caractère évènementiel (graves inondations de 1856 à 1859), faisait partie d’un important train de mesures prises pour la modernisation de l’Empire. Si effectivement du fait de son volet coercitif elle suscita un certain nombre de réactions, parfois violentes, il est généralement reconnu qu’elle fut mise en œuvre plutôt avec modération pour respecter dans la mesure du possible les doléances des populations locales ; par ailleurs, son volet incitatif (aides au reboisement volontaire en zone de montagne, y compris hors périmètres) connut un véritable succès. La loi sur la mise en valeur des marais et terres incultes appartenant aux communes (promulguée le même jour – 28/07/1860 - que la loi sur le reboisement) n’ayant pas répondu aux attentes initiales de compensation prévues notamment pour la montagne à travers l’amélioration pastorale des terrains de parcours, la loi de reboisement fut complétée en 1864 par une loi sur le regazonnement des montagnes qui reconnaissait le rôle des pâturages bien gérés dans le contrôle de l’érosion.

Enfin la loi de 1882 sur la restauration et la conservation des terrains en montagne, qui abrogeait les 2 lois de 1860 et 1864, tint compte des difficultés rencontrées en donnant en particulier davantage d’importance à la sécurité rapprochée ainsi qu’à la mise en valeur des pâturages de montagne. A quelques modifications près, elle est toujours en vigueur.

Avec le recul et surtout l’amélioration des connaissances, il peut être reprochée à cette politique, dont la réussite est par ailleurs reconnue, d’être fondée sur un diagnostic inexact car surestimant le rôle modérateur de la forêt sur les phénomènes rares et d’avoir insuffisamment pris en compte l’utilisation de terrains, en apparence de peu d’intérêt, mais qui constituaient alors un élément structurant des systèmes agraires montagnards, tout au moins jusqu’à la crise qui les concerna à partir sensiblement des années 1870-1880.

En ce qui concerne les territoires nouvellement devenus français, la priorité fut donnée à la mise en œuvre du Code forestier de 1827, avec des difficultés assez similaires à celles rencontrées antérieurement en France (en particulier pour la délimitation des propriétés et le cantonnement des droits d’usage en forêts soumises au régime forestier) malgré, au vu de la bibliographie consultée, une modération certaine dans la mise en œuvre ; les mesures RTM semblent avoir essentiellement concerné le volet incitatif de la loi (travaux facultatifs).

Les lecteurs intéressés pourront se forger une opinion plus complète en consultant par exemple les 3 études suivantes (accessibles également sur le web), que leurs auteurs ont rédigées sur la base à la fois de documents d’archives et de diverses analyses postérieures :
- Les ressources forestières de la Savoie pendant les premières années du Régime Français (1860-1875), J. Lovie, Revue de géographie alpine 1961 tome 49 N°4, pp. 741-759.
- Un centenaire oublié : les lois du 28 juillet 1860 et 8 juin 1864 sur le reboisement et le gazonnement des montagnes, P. Fourchy, Revue de géographie alpine 1963 tome 51 N°1, pp. 19-41.
- Un corps quasi-militaire dans l'aménagement du territoire : le corps forestier et le reboisement des montagnes méditerranéennes en France et en Italie aux XIX et XX èmes siècles, F. Fesquet, Thèse de Doctorat Université Paul Valéry Montpellier III, Novembre 1997, 3 vol., 992 p.

 

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