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Recommandations AEAI. Protection des objets contre les dangers naturels gravitationnels

Recommandations AEAI. Protection des objets contre les dangers naturels gravitationnels

de Egli, Thomas [ voir la fiche de l'ouvrage ]

« En Suisse, les établissements cantonaux d’assurance ont un rôle actif dans la prévention contre les risques naturels en particulier lors des phases de conception et de construction ou d’amélioration des bâtiments. »
Auteur : Jean-Pierre Requillart

Date : 01/12/2011
Niveau(x) de lecture : Praticien & Spécialiste

L’Association des établissements cantonaux d’assurance (VKF/AEAI - CH Berne) a mis à disposition des architectes, des ingénieurs et aussi des autorités un guide de recommandations sur les mesures (avec les dimensionnements correspondants) adaptées à la protection des bâtiments  contre les avalanches, les crues, les glissements de terrain et les effondrements, les laves torrentielles et les coulées de boue ainsi que les chutes de pierres et de blocs.

Ces phénomènes font partie des dangers gravitationnels localisés dans l’espace, à la différence des dangers météorologiques, des dangers climatiques et des dangers tectoniques qui concernent l’ensemble d’un territoire. Compte tenu d’un domaine apte à l’urbanisation contraint, la Confédération Helvétique a développé depuis longtemps, notamment dans le domaine des avalanches, une politique très volontariste associant aux mesures d’aménagement du territoire et aux mesures de sécurité civile des mesures de protection particulièrement poussées tant sur le plan général que très souvent aussi au droit du bâti. C’est ce dernier savoir-faire, intégrant par ailleurs les normes SIA (normes suisses sensiblement équivalentes à nos eurocodes) qui fait l’objet de ce guide.

En introduction, le guide indique les principales stratégies de protection des constructions, qu’elles soient existantes ou nouvelles, face aux phénomènes étudiés dont les diverses formes sont décrites (par exemple pour les crues : érosion des berges, inondations - le ruissellement de surface relevant du danger climatique pluie).

Il rappelle ensuite le contenu des cartes de dangers ainsi que leurs liens avec les règlements cantonaux de construction et indique les compléments apportés par le guide aux normes SIA en matière de sécurité structurale et d’aptitude au service.

Il décrit enfin les rôles respectifs du maitre d’ouvrage, de l’architecte, du spécialiste des dangers naturels, de l’autorité en charge de la construction et de l’assureur dans les différentes étapes de réalisation d’un projet (conception, autorisation, construction, réception des travaux, entretien, sinistre, réparation des dommages) : chacun a des taches précises à remplir lors de toutes ou de certaines de ces phases.

Quelques éléments d’information sur les cartes de dangers : elles sont colorées en rouge (danger élevé – zone d’interdiction), bleu (danger moyen –zone de réglementation), jaune (danger faible – zone de sensibilisation, avec mesures au cas par cas), jaune-blanc (danger résiduel correspondant à une intensité forte et une probabilité très faible – zone de sensibilisation) et blanc (aucun danger connu ou danger négligeable en l’état des connaissances – aucune limitation) ; elles résultent de la combinaison d’une probabilité de retour (1-30 ans, 30-100 ans et 100-300 ans ; au-delà : résiduel) et d’une intensité propre à chaque phénomène (3 classes cartographiées selon des grandeurs physiques précisément définies au niveau fédéral). Ces cartes de dangers, établies sous le contrôle des services cantonaux par des bureaux spécialisés après expertise approfondie, peuvent difficilement être comparées avec nos cartographies PPR établis pour une seule période de retour (100 ans en général) et faisant appel au moins pour les risques de type montagne à une approche souvent plus naturaliste, pouvant par ailleurs combiner intensité et probabilité d’atteinte ; s’en rapprocheraient néanmoins - mais en beaucoup plus sommaire sur le plan de l’expertise - nos cartes d’aléas moyennant une transformation directe en cartes réglementaires (aléa fort = rouge, moyen = bleu, faible = jaune), avec toutefois des seuils d’intensité souvent plus élevés en Suisse qu’en France, en particulier pour les inondations (entre les niveaux moyen et fort) et surtout pour les glissements de terrain (le faible englobant nos 3 classes !).

 

Pour chacun des dangers pris en compte, le guide présente les mesures recommandées selon le plan suivant :

  •  données de base à recueillir (ou à valider) sur les caractéristiques physiques du phénomène au droit de la construction ;
  • description des différentes situations de danger possibles : elles correspondent à toutes les situations pouvant être rencontrées sur le terrain (par exemple, pour une avalanche coulante : contournement d’un bâtiment rectangulaire, submersion d’un bâtiment rectangulaire, contournement d’un bâtiment précédé d’une étrave, submersion d’un bâtiment équipé d’un toit terrain) ;
  •  détermination des actions élémentaires, statiques ou dynamiques ;
  •  description détaillée des différentes mesures possibles sur le plan de la conception du bâtiment et de ses abords (par exemple, intégration dans le terrain, forme du bâtiment, utilisation des espaces intérieurs, position des ouvertures, utilisation de l’espace extérieur), sur le plan de la structure (renforcement ou étanchéité, protection des ouvertures, renforcement du toit, etc.) et sur le plan de la protection extérieure rapprochée ;
  • choix des mesures, par combinaison des mesures envisageables pour chaque situation de danger, en distinguant constructions existantes et constructions nouvelles avec pour chacune des situations en résultant, explicitation (dont indication des limites).

L’annexe présente, outre une bibliographie choisie, la méthodologie de l’analyse coût-efficacité des mesures de protection envisagées.

 

Il convient, en conclusion, de saluer le travail remarquable effectué par les auteurs pour présenter de façon claire, synthétique et opérationnelle l’éventail des mesures permettant d’intégrer la protection contre les risques naturels gravitationnels lors de la conception, la réalisation ou l’amélioration d’une construction. Ceux-ci soulignent par ailleurs que les mesures proposées, reflétant l’état actuel de l’art et devant être adaptées à chaque cas particulier, ne permettent d’empêcher des dommages, sans pouvoir totalement les exclure, ou de diminuer leur ampleur que jusqu’à un certain niveau de danger.

Avec ces limites inhérentes à la complexité des phénomènes et à l’incertitude des connaissances actuelles, le recours à ce guide ou tout au moins sa connaissance mérite, à mon avis, d’être conseillé à tous les participants à l’acte de construire (y compris les services instructeurs) en complément des guides spécifiques existants qui par ailleurs bien souvent traitent assez peu du dimensionnement et bien sûr en l’absence de tout guide … A noter que le guide récemment publié par leMEDDTL « Construire en montagne : la prise en compte du risque torrentiel » intègre, avec l’accord de VKF/AEAI, les recommandations correspondantes.

Par ailleurs, même si les contextes géographique, humain, juridique, etc. sont différents et les comparaisons difficiles, diverses réflexions viennent à l’esprit, par exemple concernant :

  • la participation souhaitable des sociétés d’assurance à la prévention en zones à risques,
  • l’opportunité de compléments aux eurocodes sur les modalités de prise en compte à la fois de la sécurité structurale et de la catégorie d’importance des bâtiments pour ce type de risques généralement à caractère soudain, brutal et souvent mortel,
  • la difficulté de prescriptions PPR pertinentes a priori au vu de la diversité des situations sur le terrain et plus généralement de l’insuffisance des expertises préalables,
  • l’étroite complémentarité entre règles d’urbanisme et dispositions constructives ainsi que la nécessaire prise en compte de particularités et de détails dans la conception et la réalisation,
  • la formation et la compétence technique particulièrement élevée requise de la part des intervenants pour les constructions en zones à risques, compte tenu de la quasi-absence de validation externe et de contrôle des études et réalisations, hors règles d’urbanisme,
  • sans doute, une certaine limitation des « dégats » pouvant résulter de ce relatif libéralisme, par le jeu d’une réglementation apparemment plus restrictive en matière d’occupation de l’espace, tout au moins pour certains phénomènes, et des coûts au moins de première construction moindres pour les particuliers, compte tenu d’implantations en théorie plus faciles à maitriser et sans doute aussi d’exigences de qualité moins élevées.

 

 

 

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