Plan Communal de Sauvegarde (PCS) | Plan Intercommunal de Sauvegarde (PICS)
Connecter les territoires devient alors une des principales interrogations dans les démarches de planification des risques et la législation tend aujourd’hui à orienter les collectivités dans cet axe.
En effet, la Loi Matras du 25 novembre 2021 consolide le modèle de sécurité civile et modernise les services d’incendie et de secours. 6 grands objectifs sont mis en avant :
Dans le cadre de l’enrichissement de l’anticipation et de la gestion de crise, l’extension des PCS à d’autres risques ainsi que l’instauration d’une approche intercommunale obligatoire pour les collectivités font leur apparition. Un plan intercommunal de sauvegarde (PICS) est rendu obligatoire, dans les cinq ans, pour tous les EPCI à fiscalité propre "dès lors qu'au moins une des communes membres est soumise à l'obligation d'élaborer un plan communal de sauvegarde".
Les événements passés et plus récents démontrent la capacité d’une catastrophe à impacter, paralyser et dépasser les frontières communales. Les inondations meurtrières des vallées de la Roya et de la Vésubie, les 2 et 3 octobre 2020, l’incendie de l’usine Lubrizol, à Rouen, le 26 septembre 2019, ou bien encore, le cyclone IRMA ayant touché les Caraïbes, entre le 30 août et 17 septembre 2017, sont des exemples clés pour illustrer ces propos. Ces catastrophes naturelles mettent en exergue la pluralité des vulnérabilités territoriales et l’hétérogénéité des capacités de résiliences communales.
Face à l’ampleur de ces événements, une collaboration intercommunale est bien souvent mise en place de manière informelle. La gestion de la crise se fait alors entre différents espaces : les espaces à secourir, plus vulnérables (en fonction de paramètres sociaux, d’exposition à l’aléa, d’accessibilité, de ressources, etc.) et les espaces ressources, c'est-à-dire, ceux qui disposent des moyens matériels et décisionnels de protection, de secours et de récupération (d’Ercole et al., 2012). La réponse opérationnelle se matérialise par des flux entre ces deux espaces et la mise en travail d’individus plus ou moins connaisseurs de la gestion de crise et qui n’ont pas toujours l’habitude de travailler ensemble.
Le Plan intercommunal de sauvegarde apparait comme un dispositif essentiel, pour la résilience territoriale, et permettant de se rapprocher d’une « gestion par bassin de risque ». Ce dispositif a pour vocation de pallier les incertitudes et les difficultés rencontrées par les gestionnaires vis-à-vis de la cohérence des moyens humains, techniques et organisationnels et de l’uniformité des « documents » en considérant l’aléa dans sa globalité.
La métropole de Bordeaux a missionné en mars 2019 le bureau d’études RisCrises pour actualiser et harmoniser les PCS de 17 communes soumises au risque inondation par les débordements de la Garonne et de la Dordogne.
En 2014, le territoire de Bordeaux Métropole est désigné Territoire à Risque important d’Inondation (TRI) pour les risques de débordement de cours d’eau et de submersion marine. Il présente une particularité géographique du fait de sa situation à la confluence des fleuves Garonne et Dordogne en fond d’estuaire de la Gironde. La métropole bordelaise est ainsi soumise à un régime fluvio-maritime.
En effet, de nombreux facteurs interviennent dans la genèse des inondations de la Garonne et de la Dordogne sur le territoire métropolitain : coefficient de marée, vitesse et direction du vent, surcote atmosphérique par les phénomènes de basses pressions, débit fluvial.
Tous ces paramètres occasionnent une large possibilité d’événements d’inondation et complexifient la gestion de crise pour les communes et services de secours. Ce projet PICS s’intègre donc dans un objectif global de réduction de la vulnérabilité de la métropole bordelaise face à une crise inondation de grande ampleur. De plus, l’objectif était aussi que la méthodologie et les documents opérationnels produits soient transposables aux autres risques impactant le territoire.
Bordeaux Métropole a fait le choix d’aborder ce projet dans une dimension intercommunale afin d’appréhender la gestion du risque à une échelle cohérente, celle du bassin de risque. Elle vise la coopération et la collaboration entre les communes.
Le but : faciliter l’interaction et la coordination entre les communes touchées et celles non impactées et favoriser à terme la résilience territoriale à l’échelle globale.
« Cette démarche que nous avons souhaité innovante pour le territoire s’est appuyée autour de la constitution d’un réseau métier « Prévention et gestion de crises », piloté par Bordeaux Métropole, réunissant élus et agents des communes, acteurs institutionnels en charge de la planification et du secours (Préfecture, SDIS, DDTM, DREAL) et le bureau d’études RisCrises.
S’inscrivant dans un objectif global de soutien stratégique et opérationnel vis-à-vis des communes cette action s’est attachée à :
- Proposer une assistance aux communes dans une démarche pédagogique et de co-construction ;
- Mettre à disposition des documents opérationnels pour accompagner et faciliter la prise de décision au sein de chaque organisation communale en situation de crise ;
- Etablir un référentiel commun à l’échelle du bassin de risque en matière de réponse opérationnelle : cartographie opérationnelle partagée, scénarios communs de montée en puissance, inter-opérationnalité des structures de gestion de crise (postes de commandement communaux, cellule métropolitaine de crise) ;
A l’heure où ce projet se termine, une vraie dynamique autour de ces enjeux s’est engagée à l’échelle du bassin de risque. Plusieurs pistes de réflexion sont engagées pour élargir cette approche aux autres typologies de risques dont le risque industriel et organiser dans un premier temps des exercices partiels à l’échelle communale et intercommunale. »
La mission PICS s’organise autour d’un réseau métier structuré en plusieurs groupes de travail réfléchis par zone géographique. Ce réseau métier vise plus globalement la sensibilisation et l’implication des différents acteurs locaux aux problématiques de prévention et de gestion de crise.
La mission s’articule selon la méthodologie préconisée par le ministère de l’Intérieur (direction de la Défense et de la Sécurité civile), retranscrite dans le guide pratique d’élaboration du PCS, définissant sept grandes étapes :
RisCrises accompagne la métropole de Bordeaux dans les étapes 2, 3, 4, 5 et 6. Ainsi, pour chacune de ces cinq phases, RisCrises co-anime avec Bordeaux Métropole l’ensemble des réunions prévues et listées ci-après :
– deux réunions plénières, appelées « Groupe de travail », visant à présenter les grands objectifs de la phase correspondante. Il a ainsi été défini un « Groupe de travail rive droite » et un « Groupe de travail rive gauche ».
– une réunion individuelle par commune (soit 17 réunions individuelles par phase), visant à accompagner et monitorer chaque commune dans l’atteinte des objectifs fixés par la phase correspondante.
– une réunion « Comité Technique », réunissant l’ensemble des parties prenantes du projet (Elus métropolitains, Préfecture, DREAL, DDTM, SDIS 33, associations, etc.) et dont l’objectif est de favoriser les échanges entre les différents intervenants pour permettre la bonne orientation stratégique du projet et la validation des réflexions et des propositions d’actions effectuées au sein des réunions individuelles.
La phase 1 vise dans un premier temps à caractériser l’aléa inondation sur le territoire métropolitain par la compilation des documents existants, l’analyse des archives ou encore le recueil des témoignages.
Il a été fait le choix d’identifier trois scénarios d’inondation, permettant une prise en compte de la montée en puissance éventuelle d’un événement d’inondation sur le territoire métropolitain. Les deux premiers scénarios sont définis selon deux événements de référence historique (identifiés notamment dans le rapport de présentation du TRI de Bordeaux), et un événement exceptionnel incluant les conséquences du changement climatique sur la montée du niveau marin au niveau de l’estuaire de la Gironde, à savoir la tempête de 1999 + 20 cm.
Le choix de ces scénarios a fait l’objet d’un partage et d’une validation avec l’ensemble des acteurs publics (SDIS, SIDPC, Service de Prévision des Crues, DDTM), lesquels pourront préfigurer les dispositions du futur dispositif ORSEC inondation de la Gironde.
L’identification de ces trois scénarios a conduit à la production de trois cartographies opérationnelles du risque inondation sur la métropole de Bordeaux. L’aspect cartographique revêt une importance majeure dans cette phase de travail puisqu’il permet d’apporter aux élus locaux une vision globale de l’expansion spatiale de l’aléa et, in fine, d’aboutir à une meilleure connaissance locale du risque inondation sur leur territoire.
Le diagnostic des risques doit également permettre d’identifier l’ensemble des enjeux humains, matériels, organisationnels et économiques de la commune pouvant être impactés. La vulnérabilité du territoire est ainsi questionnée amenant à la distinction locale de poches d’enjeux, au niveau desquelles une planification stratégique des actions doit être établie. C’est dans cet objectif, et afin d’élaborer les stratégies d’actions les plus opérationnelles, que nous réalisons le diagnostic des risques à travers une vision spatiale dynamique de l’aléa par l’identification de scénarios d’inondation.
Par ailleurs, ce travail de recensement des enjeux à l’échelle du bassin de risque a permis à Bordeaux Métropole de créer une plateforme cartographique dédiée à la gestion de crise regroupant l’ensemble de ces données. Cet outil a vocation à être déployé pour toutes les communes ciblées par le projet. Il est également envisagé une mutualisation de l’outil auprès des autres acteurs de la gestion de crise au niveau local (SDIS, COD).
Cette deuxième phase vise à définir le dispositif communal de gestion interne de l’alerte via l’élaboration d’un règlement d’emploi des moyens d’alerte. Nous accompagnons les communes à appréhender les trois étapes chronologiques de l’alerte et de l’information de la population : réception, traitement et diffusion, de l’échelle préfectorale à l’échelle communale et très locale jusqu’à la population.
Le dispositif communal prévoit la définition de l’ensemble des moyens d’alerte disponibles et réquisitionnables par la commune, ainsi que les procédures associées. De plus, pour répondre à cette nécessité de gestion de l’alerte en tout temps, le dispositif de gestion de l’alerte doit intégrer le dispositif d’astreinte élaboré avec la commune.
La phase 3 doit permettre le recensement et l’optimisation des moyens humains et matériels, publics et privés, de la commune, en concertation avec Bordeaux Métropole, selon la mutualisation des moyens effectuée dans le cadre du transfert de compétences. Ce recensement, réalisé à l’issue d’un listing et inventaire des moyens disponibles permet également de dresser un état « à l’instant T » des moyens communaux.
L’ensemble des données recueillies dans chaque commune alimente la base commune développée par Bordeaux Métropole, dans le but d’assurer la transcription de ces informations vers un annuaire de crise commun. Nous assurons sa mise à jour et sa transposabilité vers les systèmes d’information géographique (SIG) de gestion de crise à usage métropolitain et communal. Bordeaux Métropole souhaite, à travers la dimension intercommunale du projet, favoriser l’entraide matérielle et humaine entre les communes impactées et les communes dites « ressources », plus elle-même.
Au cours de la phase 4, nous assurons l’analyse des organisations communales prévues dans les PCS déjà existants et achevés en soumettant des propositions d’évolution adaptées à leurs besoins et leurs capacités.
Nous accompagnons les communes dans la définition minutieuse des missions et des responsabilités de chaque cellule de crise et dans l’élaboration des procédures de mobilisation des acteurs. Le dispositif communal de gestion de crise établi doit permettre à la commune une montée en puissance en fonction des besoins et des scénarios d’aléas identifiés.
Cependant, dans cet objectif constant d’améliorer l’inter-opérationnalité entre les communes et Bordeaux Métropole (notamment dans la gestion des ressources et des personnes sinistrées), il a été fait le choix d’harmoniser à travers les 17 communes leurs organisations communales. Deux organisations types ont été proposées et établies avec les communes selon la taille de la commune et la disponibilité de leurs moyens humains.
L’intérêt étant de pouvoir disposer entre toutes les communes d’un même bassin de risque, et entre ces communes et Bordeaux Métropole, d’une organisation de crise similaire qui s’articule sur les mêmes cellules de crise. Ceci facilite ainsi les échanges et l’orientation stratégique des actions lors d’un événement comparable à celui identifié au cours de la phase 1.
Nous avons mis à profit notre expérience des PCS pour accompagner les communes dans la réalisation de documents opérationnels de gestion de crise adaptés à l’organisation et aux moyens propres des communes, sur la base de concertation avec elles. Le but étant de favoriser une meilleure appropriation des documents par les gestionnaires locaux et de perfectionner, de par leur vision très locale de la gestion des événements, l’opérationnalité des documents.
Si la démarche d’avancée commune, saluée par l’ensemble des élus et agents communaux sollicités, est un véritable atout pour renforcer le caractère opérationnel de chaque dispositif de gestion de crise communal, elle ne peut se faire sans avoir correctement identifié les besoins et les capacités de chaque commune. C’est ce qu’a fait Bordeaux Métropole en planifiant des rencontres individuelles avec les communes cibles en amont du projet, afin d’adapter au mieux la mission d’accompagnement selon les spécificités de chacune d’entre elles.
Par sa dimension collaborative, le projet impulse une véritable dynamique qui incite les communes à avancer simultanément phase par phase. La planification de réunions inter-phases, comme les réunions plénières ou les réunions « Comité technique » contribue également au maintien de cette dynamique par l’instauration de dates butoirs collectives à la réalisation des différentes phases. Ainsi, tout au long du projet, chaque commune peut tirer profit d’un niveau d’avancement équivalent, facilitant les échanges entre elles et la définition d’idées de manœuvre communes et/ou harmonisées, nécessaires pour appréhender la gestion d’une crise à l’échelle d’un bassin de risque.
L’avancée simultanée est très certainement un paramètre auquel un tel projet doit sa réussite. Mais pour cela, il est avant tout nécessaire pour le porteur de projet de pouvoir s’adapter au rythme de chacune des communes, sans quoi certaines peuvent décrocher, et retarder les délais de réalisation de la phase en cours pour tous et du projet dans son ensemble. Le rythme d’une commune est principalement lié au temps et aux moyens qui lui sont disponibles. Ces deux critères peuvent être assez hétérogènes entre les différentes collectivités d’un même territoire. Bordeaux Métropole et RisCrises ont su contourner ce point de butée par leur accompagnement bilatéral adapté et par la mise à disposition d’outils opérationnels permettant de renforcer l’autonomie des communes dans la définition de leurs procédures de gestion de crise.
Témoignage de Fabien Genovesio, chargé de mission développement économique - Commune de Bassens (33)
« La métropole bordelaise et plus particulièrement la presqu’île d’Ambès constituent un territoire influencé par les évènements fluviomaritimes et les crues de la Garonne pouvant aboutir à des inondations sur des secteurs sensibles ou vulnérables.
Le retour d’expériences partagé des évènements plus ou moins récents (tempêtes du 27 décembre 1999, Xynthia en février/mars 2010, évènements de février 2014 et grandes marées de 2015…) a démontré tout l’intérêt d’une approche transversale et d’une stratégie commune.
Dès 2016, certaines communes particulièrement actives sur les questions du risque inondation et les services concernés de Bordeaux Métropole ont réfléchi à l’élaboration d’une culture de travail commune et à la préfiguration d’outils de coordinations des acteurs. Cette volonté a abouti à la mise en œuvre d’un plan d’intervention inondation (P2I) métropolitain constituant le document de référence sur les postures opérationnelles à adopter en fonction d’un scénario de débordement.
Par la suite, c’est bien l’enjeu d’harmoniser les PCS communaux des 16 communes de Bordeaux Métropole soumises au risque inondation qui a constitué la réponse pragmatique, coordonnée et opérationnelle de gestion de crise. Ce travail en commun, à l’initiative de Bordeaux Métropole accompagnée par le BET RisCrises, permet à chaque acteur de terrain d’être au même niveau et de disposer d’outils opérationnels communs, intuitifs et adaptés aux réalités locales.
Au final, cette démarche a enrichi mutuellement chaque acteur et permet de mettre en perspective collectivement une réponse opérationnelle face à un risque majeur d’autant plus prégnant dans les années à venir avec les effets du changement climatique. »
Non loin des objectifs du plan intercommunal de sauvegarde (PICS), Bordeaux Métropole aspire davantage, par son approche intercommunale, à l’harmonisation des organisations communales de crise des différentes communes de l’intercommunalité soumises au risque inondation. Cette stratégie permet d’assurer une structuration en miroir des dispositifs et outils opérationnels de gestion de crise à l’échelle métropolitaine et l’éventuelle prise en main par les forces de secours opérant sur le terrain.
Cette démarche, en amont, d’harmonisation et de mise à disposition de supports communs est un premier pas vers le PICS. Le Plan intercommunal de sauvegarde ne peut être efficient que si les PCS sont connus, acceptés et réalisés sur toutes les communes du territoire concerné. Un travail préliminaire de sensibilisation, de création d’un groupe de travail intercommunal et d’un vocabulaire commun facilite alors les démarches à plus grande échelle.
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