Des phénomènes complexes…


... du fait de l’hétérogénéité des mouvements au sein d’un même glissement

Dans la majorité des cas, les glissements ne se déplacent pas d’un seul bloc : tous les compartiments ne suivent pas forcément la même direction et n’évoluent pas à la même vitesse.

En cause, les hétérogénéités du sol, car il ne présente pas partout les mêmes propriétés (nature des matériaux, pente, localisation des infiltrations et des écoulements etc.), ce qui a deux effets :

  1. d’une part toutes les zones ne sont pas soumises aux mêmes contraintes, ou pas à la même intensité,
  2. d’autre part, lorsqu’une contrainte (la pression interstitielle par exemple) s’exerce de manière uniforme sur l’ensemble du site, elle va être plus ou moins bien supportée par les différents secteurs.

A titre d’exemple, le glissement qui affecte la combe du Mas à Avignonet présente des mouvements plus marqués dans sa partie sud, située essentiellement dans des argiles litées, qu’au nord où les terrains sont par endroits recouverts de moraines caillouteuses qui réagissent différemment aux infiltrations.

 

... du fait de leur irrégulière évolution au cours du temps

Les conditions physiques, et donc les contraintes, varient dans l’espace mais également avec le temps. C’est ce qui explique qu’un glissement n’évolue pas continuellement de la même manière ni à la même vitesse au cours de sa vie.

 

Les quatre grandes phases d’évolution d’un glissement de terrain

Phase 1 - stabilité : le rapport entre les forces de gravité et de cohésion est équilibré

Phase 2 - mouvements lents : la perte de cohésion entraîne un déplacement de la masse qui se met à glisser, généralement lentement (de quelques millimètres à quelques centimètres par an), mais qui peut cependant s’arrêter temporairement si les contraintes diminuent ; cette situation peut se maintenir pendant plusieurs années ou dizaines d’années

Phase 3 - accélération continue : la contrainte est constante et devient trop importante, si bien que les déplacements s’amplifient

Phase 4 - rupture : il y a départ des matériaux à des vitesses parfois très élevées

 

Les phases de mouvements lents et d’apparente stabilité alternent généralement au fil des saisons. L’activité d’un glissement est donc irrégulière au cours même d’une année, puisqu’il est souvent relativement stable pendant plusieurs mois et présente des mouvements ou des accélérations lorsque le contexte y est propice, en particulier quand les apports en eau (de précipitations et de fonte des neiges) sont importants, en hiver et au printemps.

Au cours de la rupture, les masses emportées viennent se déposer en contrebas avec un certain équilibre, et les terres glissées retrouvent leur stabilité. Le processus peut alors recommencer : c’est ainsi que la plupart des glissements actuels correspondent en réalité à la réactivation d’anciennes instabilités. Dans le Trièves-Beaumont, il est probable que les glissements se soient déclenchés à la fin de la dernière glaciation, il y a plus de 10 000 ans !

Autrement dit, il faut bien avoir à l’esprit que les glissements que l’on observe aujourd’hui évoluent de manière irrégulière, mais également que les mécanismes actuels ne constituent en réalité qu’une infime partie d’un processus qui évolue à l’échelle des temps géologiques.

 

... du fait de leurs structures variables

Complexes, les glissements des argiles du Sud Isère le sont aussi à cause de leurs structures. Les surfaces de cisaillement (ou de rupture), niveaux où les couches supérieures de matériaux se désolidarisent du sol sous-jacent et se mettent à glisser, peuvent se situer à des profondeurs extrêmement variables. Cela peut notamment dépendre de la disposition des couches d’argiles et, lorsqu’il y a des écoulements souterrains, de leur localisation.

Les versants n’évoluent pas de la même manière selon la profondeur de cette surface de rupture. Lorsqu’elle est située dans les dix premiers mètres du sol, on parle de glissements superficiels. Ce sont eux qui entraînent les déformations les plus perceptibles en surface (ouverture de fissures dans le sol, moutonnement du terrain etc.) qui peuvent être spectaculaires. Les glissements profonds, eux, n’entraînent généralement pas de déformations aussi nettes en surface, mais ce sont ceux qui mobilisent les plus grands volumes de matériaux.

Il arrive que des versants soient affectés de plusieurs surfaces de cisaillement situées à des profondeurs différentes. Dans cette situation, plusieurs glissements se retrouvent emboîtés (pour schématiser, on peut comparer ce type de structures avec des pelures d’oignons). Ces phénomènes s’avèrent alors particulièrement complexes à appréhender dans la mesure où chaque glissement peut disposer de ses propres caractéristiques, et ainsi évoluer indépendamment des autres.

Reprenons l’exemple du glissement d’Avignonet, pour lequel on dispose de nombreuses données : il est constitué de glissements superficiels très actifs et d’un glissement profond plus lent, dont la surface de rupture a été décelée à une quarantaine de mètres en dessous de la surface du sol. Les premiers sont responsables de la fissuration, parfois importante, des constructions et des routes. Mais c’est le mouvement profond qui constitue la principale menace, car s’il y a aura rupture, c’est plusieurs dizaines d’hectares de terrain qui seront emportés.

   
 

 
 


 

 

 

 Vue aérienne du glissement du Serre-des-Bayles en 1978
Vue aérienne du glissement du Serre-des-Bayles en 1978



 

VIDEOS


Monestier-du-Percy, 1978 - Le glissement de terrain du Serre-des-Bayles (Interview de Samuel Martin, maire de Monestier du Percy)



 
  © 2000 - 2015 Institut des Risques Majeurs | Plan du site | Notice légale | Crédits |